J’aurais pu comparer ce livre au Maître des illusions, premier livre de Donna Tartt mais je ne l’ai pas lu, j’aurais pu comparer ce roman à Olivier Twist de Charles Dickens mais je ne l’ai pas ouvert non plus alors j’ai abordé la lecture de ce pavé de 800 pages, sans idées préconçues quant au style et sans attente particulière. Je ne savais même pas vraiment de quoi il parlait, la 4ème de couverture avait suffi à me convaincre. Comme il est lourd et épais, il n’a pas quitté ma table de chevet et je ne me suis pas vraiment pressée pour le lire, j’ai même un peu traîné dans la dernière partie parce que j’avais envie de rester un peu plus avec les personnages de ce livre, je ne voulais pas que le mot fin arrive encore.
Le chardonneret est ce petit oiseau qu’on aperçoit sur la couverture mais aussi une des dix peintures de Carel Fabritius, élève de Rembrandt dont il adopta la clarté caractéristique aux tableaux de l’artiste. Le chardonneret est le fil conducteur d’un roman foisonnant qui conduit de New York à Las Vegas en passant par Amsterdam. Pour ce qui concerne l’intrigue à proprement parler, je m’en tiendrais au minimum pour ne pas éventer la surprise, sachez juste qu’un drame fait basculer la vie de Théo, jeune garçon de 14 ans qui vit avec sa mère. C’est à travers son regard que Donna Tartt réussit le pari d’emmener son lecteur dans une véritable saga initiatique comme seuls les américains savent les écrire. Au delà des aventures du personnage principal, l’écrivain aborde avec brio les thèmes du bien et du mal, de la culpabilité, des secrets, des méandres de la mémoire, du destin, de l’amitié et de la solitude.
J’ai été particulièrement touché par les relations entre Théo et Pippa, une jeune fille dont il est fou amoureux même si cet amour ne sera jamais vécu. Pour moi, et c’est probablement mon côté fleur bleue, quelques unes des plus belles pages du livre sont celles où il parle d’elle, celles où il raconte tous les sentiments qu’il ressent à son égard. C’est d’autant plus fort que Pippa est loin d’être une fille parfaite physiquement, un canon, une bombe comme on dirait aujourd’hui…elle est même un peu éclopée, cassée mais ses fêlures la rendent d’autant plus attirantes pour notre héros.
« C’était extraordinaire – j’entendais à peine ce qu’elle me disait. C’était toujours comme ça quand j’étais dans une pièce avec elle, sa présence supplantait tout : sa peau, ses yeux, sa voix rouillée, ses cheveux couleur de feu et sa façon de pencher la tête qui parfois lui donner l’air de fredonner pour elle-même »
« Table minuscule. Mon genou contre le sien – en était-elle consciente ? Autant que moi je l’étais ? La flamme de la bougie s’épanouissait sur son visage, brillant d’une lueur métallique dans ses cheveux, si lumineux qu’ils semblaient sur le point de s’enflammer. Tout flamboyait, tout était doux. Ils passaient du vieux Bob Dylan, ce qui était plus que parfait pour les rues étroites du Village à l’approche de Noël, avec la neige qui tombait en tourbillonnant en gros flocons plumeteux, le genre d’hiver où l’on n’a qu’une envie : marché dans les rues, le bras passé autour des épaules d’une fille comme sur la vieille pochette du 33 tours -parce que Pippa était exactement cette fille-là, pas la plus jolie, le genre de fille sans maquillage, banale en apparence, mais avec qui le garçon sur la photo avait l’air heureux; en fait cette image représentait un idéal de bonheur, ses épaules à lui remontées et l’aspect légèrement gêné de son sourire à elle, cet air de fin ouverte comme s’ils pouvaient filer ensemble où ils voulaient …et elle était là ! »
L’amour dans la vie de Théo est rêvé ou regretté, espéré ou attendu, jamais vraiment exprimé, étouffé même. Son destin tragique est néanmoins jalonné de rencontres avec des personnages hors du commun. Auprès d’Hobbie l’antiquaire, de la famille Barbour ou de Boris un russe complètement barré, le jeune homme trouve refuge. Grâce à eux, il se maintient à la surface in extremis car il est bien question de chute pendant ces 800 pages et à chaque nouveau paragraphe, on se demande si le destin va finir par tourner ou si ce qu’on craint le plus va arriver.
Le Chardonneret est à la fois un thriller dont l’écriture subtile et violente happe et pousse à connaitre la suite, le portrait magnifique et complexe d’un être balloté par la vie, un roman érudit (mais jamais rasoir) et très riche dans lequel chacun pourra peut-être puiser des réponses sur ce qui donne sens à la vie.
13 Comments
Cette histoire a l’air d’être pleine de poésie , et bien écrite.
Je note sur ma liste.
Merci et bonne journée !
Ils en parlaient dans le dernier « Masque et la Plume » sur France Inter. J’ai adoré les 2 livres précédents de cet auteur ; depuis que je sais qu’elle en a sorti un autre, j’ai hâte de l’acheter ! Ta chronique m’en donne encore plus envie !
Une fois de plus tu m’as donné envie de le lire… Je le rajoute à ma très longue liste !
Allez hop, sur ma liste ! Merci 🙂
Je l’ai gagné sur le site vendredi lecture, j’attends de le recevoir
je ne connais pas cet auteur, j’ai lu le résumé ça a l’air pas mal.
Plus qu’a attendre qu’il arrive dans ma boite aux lettres.
chouette pour le vendredi lecture !
Et voilà, encore un livre que j’ai envie de lire… Je veux des journées de 48h!!!
on signe où pour les journées de 48h ? )
Ce livre m’a attirée dans le hall de la gare l’autre jour. Je trouvais la couverture splendide… Je me laisserais peut-être tenter.
et tu as choisi un autre livre ?
En tout cas tu donnes vraiment envie de le lire ! Je regarderai à la médiathèque… bises.
peut-être dans les nouveautés, il n’est pas sorti il y a très longtemps
bises