Aucune de mes 4 dernières lectures ne m’a vraiment enthousiasmé. Elles ne m’ont pas ennuyées, je ne les ai pas abandonnées en cours de route mais si là tout de suite, vous me demandiez quel livre je conseillerais absolument parmi ces 4 romans, je n’en citerais probablement aucun. Je les partage tout de même avec vous car peut-être étais-je tout simplement dans un moment où je n’ai pas été réceptive à grand chose.
Lire, vivre et rêver
Enfant j’étais je crois une grande lectrice, adolescente aussi et aujourd’hui je n’envisage pas la vie sans livre (papier) alors forcément un livre qui parle des librairies ne pouvait qu’attirer mon attention (avec en plus ce bandeau un peu racoleur « un livre peut changer votre vie, un libraire aussi« ). En effet 21 écrivains racontent dans ce recueil les livres et les libraires qui ont changé leur vie (sic). Bon j’avoue j’ai choisi mes chapitres : Olivier Adam, Jean-Philippe Blondel, Arnaud Catherine, David Foenkinos…des auteurs dont j’ai lu plusieurs livres. J’imaginais des histoires ou des rencontres extraordinaires, des libraires hauts en couleurs et j’ai trouvé les passages lus plutôt fades et bien en dessous d’ Une histoire de la lecture et de Journal d’un lecteur d’Alberto Manguel.
Le voyant de Jérôme Garcin
Si je n’avais pas entendu parler du livre et de l’homme qui l’a inspiré dans l’émission On n’est pas couché, je n’aurais probablement pas ouvert Le voyant qui n’est pas vraiment un roman dans la mesure où il raconte la vie de Jacques Lusseyran, écrivant-résistant peu connu en France alors qu’il a eu un parcours exceptionnel. Le problème des chroniques télévisuelles que ce soit pour les livres ou pour les films (en tous cas dans cette émission) est qu’on nous raconte déjà quasiment tout. Il n’y a donc plus beaucoup de surprise en découvrant la fiction en question.
J’ai été aussi un peu gênée par l’admiration sans réserve de l’écrivain pour ce personnage (ça tourne parfois à l’hagiographie) même s’il faut bien reconnaitre que son destin est pour le moins hors du commun. Aveugle à 8 ans mais jamais autant « voyant » qu’à partir de ce moment là, résistant à 17 ans, déporté à Buchenwald, enseignant adulé aux Etats-Unis, il meurt à seulement 47 ans dans un accident de voiture.
Les pages les plus terribles sont celles de sa survie dans le camp de concentration. Les pages les plus belles sont, pour moi, celles consacrées aux femmes avec qui il avait beaucoup de succès.
Il ne sait pas qu’il est séduisant, mais il ne peut ignorer qu’il plaît. Il se regarde dans les yeux des femmes qu’il ne voit pas. Elles sont le miroir sans tain derrière lequel disparait son handicap. Il a des mains de sculpteur et découvre leur beauté avec les doigts, donne des couleurs à leur eau de toilette et un visage à leur souffle. Elles succombent volontiers à cet homme si différent des autres, tellement plus prévenant et comme doté d’un sixième sens.
Quand le diable sortit de la salle de bains
Le plus foutraque, déjanté, drôle aussi parfois de mes dernières lectures est Quand le diable sortit de la salle de bain, dernier roman de Sophie Divry (une lyonnaise, l’histoire se passe d’ailleurs à Lyon). Dans ce livre, on se glisse dans la peau de Sophie, une jeune chômeuse qui tente très difficilement de joindre les deux bouts.
Ce que j’ai aimé dans ce livre c’est cet espèce d’humour du désespoir, un peu à la Woody Allen. La vie de Sophie n’est pas franchement rose : elle a faim, elle a froid dans son petit studio mal chauffé, elle vivote comme elle peut et arrive à garder sa capacité à rire de tout cela.
Le roman dit aussi très bien cette honte d’être pauvre et cette fierté à ne rien dire sur la gravité de la situation pour garder la tête haute. L’angoisse vous ronge mais pas question de la partager et de se prendre en pleine face la pitié des autres.
J’ai moins aimé ses digressions, ses figures de style, ses longues énumérations qui cassent, pour moi, la force du récit.
Alors, avec la sensation de commettre un immense péché, je m’assis à la terrasse du snack-bar voisin et commandai un expresso.
-Il ne faut jamais boire un café, l’estomac vide, ma fille !
Les riches ne comprennent pas pourquoi les pauvres font de mauvais choix; pourquoi certains en viennent à s’alcooliser plutôt que de s’acheter de la viande avec de patientes économies. Mais les riches n’ont pas besoin de desserrer l’étau qui les étouffe. Leur problème à eux, c’est de se mettre des limites. Quand on n’a pas d’argent, les limites au contraire ne vous lâchent jamais; on passe son temps à compter, le nez dans un misérable porte-monnaie. Le plaisir du pauvre consiste à s’extraire un moment de cette pression. Ce seront des dépenses inconsidérées, de minuscules mais incoercibles coquetteries, et quand s’ouvrent grand les portes d’un irénique irrationnel, il s’agit de jouer au loto, perdre la tête, faire une folie. […] Déguster un café, quand on est chômeur, cela devient une occupation sérieuse. Dans un bar, on peut lire le journal, écouter les conversations, regarder travailler les serveurs, suivre la moitié audible d’une dispute au téléphone portable..et se sentir, par ces saynètes, participer à un corps social vivant.
Les gens dans l’enveloppe d’Isabelle Monnin
avec Alex Beaupain
Livre peu banal par son mélange des genres, c’est d’abord le nom d’Alex Beaupain dont j’aime beaucoup les textes et les mélodies, qui m’a attiré. Un jour Isabelle Monnin, écrivain-journaliste, a acheté une série de photos de personnes qu’elle ne connaissait pas. Elle a rangé les clichés dans une enveloppe et puis l’idée est venue d’inventer une histoire à ces personnes, d’imaginer les liens tissés entre elles. Elle est ensuite partie à leur recherche, la seconde partie du livre est donc consacrée à l’enquête.
Le livre est accompagné d’un CD, de chansons comme « bande-son » des gens dans l’enveloppe.
J’ai préféré le roman à l’enquête, la vie de cette famille étant encore plus banale (et pour moi étouffante) dans la réalité que dans la fiction même si l’histoire de cet homme et de cette femme (mariée) qui s’aiment en secret et sans se le dire pendant 8 ans avant de franchir le pas est très romanesque.
Elle dit :
« Quand il y a l’ombre, il y a toujours de la lumière et une simple bougie suffit à éclairer l’ombre. La lumière gagnera toujours. »
Elle s’éteignait avec Michel.
Jean-Paul avait la patience de l’allumeur de réverbère. Pendant huit ans, chaque jour, il portait sa petite bougie dans la pénombre de Suzanne. Chaque matin, elle l’attendait, elle ne savait rien de lui, il s’aimaient déjà bien-sûr. […]
Huit ans d’amour secret, non déclaré, huit ans à rêver d’elle, à s’imaginer dans ses bras, à se rêver dans ses rondeurs, à savoir sans le dire.
8 Comments
Tu ne donnes pas envie de courir en chercher un à la librairie du coin en tous cas 😉 J’ai aperçu ces livres mais sans avoir envie de les lire, et puis, je suis dans une période à « faible lecture » avec la fatigue alors autant me concentrer sur des romans qui me tentent….
désolée d’habitude j’essaie de donner envie mais là rien ne m’a vraiment enthousiasmé
J’ai une PAL longue comme mon (mes) bras, mais il n’empêche que je suis assez tentée par Le Voyant!
ma pal n’est pas immense en ce moment (ou plutôt pas envie de lire grand chose ça passera)
Le livre de Sophie Divry m’a plu sous toutes ses coutures, même ses jeux littéraires.
Nous avons flashé pour le même extrait.
Pour « Le voyant », j’ai été séduite par l’énergie du personnage enfant. Ensuite, l’ignorance dont il a fait preuve envers ses enfants m’a vraiment déplu.
Finalement, Jérôme Garcin utilise une très belle écriture pour en parler mais je n’avais pas senti qu’il était admiratif à ce point.
Je vais commencer le livre de Ian Mc Ewan après ma lecture de « Rien de personnel » que je termine tout doucement.
Il est intéressant votre blog.
pour Sophie Divry, malgré mes réserves, cela m’a donné envie de lire un autre de ses livres
le passage qui m’a le plus agacé c’est celui avec le gourou (mais qui s’explique peut être par ce qu’il a vécu dans les camps) dans le voyant
je n’ai pas chroniqué Mc Ewan mais je l’ai trouvé très bien !
bon dimanche à vous
J’ai adoré les gens dans l’enveloppe, mais contrairement à toi, surtout la partie « enquête ». En fait je crois que j’ai dévoré la partie roman à vitesse grand V, pour arriver à la deuxième partie que j’ai laissée traîner pour la savourer…
Par contre j’ai trouvé le CD anecdotique, une fois passée la curiosité d’entendre la voix des » vraies » gens.
avec le recul je ne pense pas que cela fera partie des bouquins dont je me souviendrais pendant longtemps même si le concept est original