C'est un beau roman

L’hibiscus pourpre de Chimamanda Ngozi Adichie

Si je suis incapable de prononcer correctement le nom complet de cet auteur, si ma fleur sur la photo n’est pas du tout un hibiscus (je suis nulle en botanique mais quand même), je peux par contre affirmer que livre après livre, je suis conquise par la plume de Chimamanda Ngozi Achidie.

Pire, à peine sortie de la lecture d’un de ses romans, j’ai envie d’en découvrir un autre, d’autant plus que je n’ai, pour le moment, pas l’impression de relire un peu toujours le même livre (comme c’est le cas parfois avec Paul Auster que j’aime beaucoup ou comme c’est le cas des romans policiers que je n’enchaîne jamais).

Les livres dont on se souviendra toute une vie quand on lit pas mal, est ce qu’il y en a tant que ça ? ces livres qu’on a envie de conseiller à tous ceux qui nous demandent quoi se mettre non pas sous la dent mais sur la table de chevet ? Sans hésitation, dans ma liste, il y aurait Americanah, le roman par lequel j’ai découvert Chimamanda Ngozi Adichie. Je ne vais pas réécrire une chronique à son sujet, je l’ai déjà faite. Mon côté fleur bleue a retenu en premier une histoire d’amour très romanesque mais Americanah est bien plus riche que cela et s’il fallait en dire une seule chose, c’est qu’on comprend parfaitement, même sans l’avoir vécu, ce qu’est le racisme ordinaire, quotidien, insidieux.

(je viens de vérifier son âge, elle est née en 1977, juste dingue d’avoir écrit un roman aussi ambitieux si jeune )

J’ai aussi partagé ici mon enthousiasme pour L’autre moitié du soleil, qui est en réalité son deuxième roman, et qui raconte la vie des deux soeurs séparées pendant la guerre du Biafra. On retrouve la force avec laquelle elle incarne chaque personnage, son lyrisme mêlée au réalisme et encore une fois son talent à me faire vivre avec une puissance et une justesse incroyables une situation tragique que je n’ai pourtant jamais connu.

Ne dit-on pas deux sans trois ? Je viens ainsi de terminer son premier roman, L’hibiscus pourpre. Cette fois, je me suis laissée glisser sans peine dans la peau de Kambili, une jeune fille qui vit, avec son frère aîné Jaja, dans une famille nigériane aisée dont le père est un catholique fondamentaliste (pour ne pas dire intégriste).

Alors que le père exerce une emprise sans pareille sur la cellule familiale, qu’il apparait comme omniscient et quasi icône à travers les yeux de Kambili, sa place et son autorité vont être remises en cause. En effet suite à un coup d’état, Jaja et Kambili trouvent refuge chez leur tante Ifeoma et vont découvrir un quotidien plein de rires, de bruits, de discussions à table.

L’hibiscus pourpre est un roman d’initiation mais aussi un roman d’émancipation même si le chemin de la libération du passé est plus que douloureux. Je ne saurai dire vraiment pourquoi ce texte m’a bouleversé alors que j’ai si peu de signes d’identification à cette histoire.

Je vous laisse donc avec un court extrait qui vous donnera envie, j’espère, de faire le premier pas vers Chimamanda Ngozi Adichie, extraordinaire conteuse moderne.

Qu’est ce qui t’est arrivé au petit doigt ? demanda Chima

Jaja baissa les yeux lui aussi, comme s’il ne remarquait que maintenant le doigt noueux, déformé comme un bâton desséché.

Jaja a eu un accident dit rapidement Tatie Ifeoma […]

Quand son regard croisa le mien, je détournai la tête. Elle savait. Elle savait ce qui était arrivé au doigt de Jaja.

A l’âge de dix ans, Jaja avait raté deux questions dans son contrôle de catéchisme et il n’avait pas été nommé meilleur élève de son cours de première communion. Papa avait emmené Jaja en haut et fermé la porte à clef. Jaja, en larmes, était ressorti en tenant sa main gauche avec sa droite et Papa l’avait conduit à l’hôpital Saint Agnès. Papa pleurait, lui aussi, en portant Jaja dans ses bras comme un bébé jusqu’à la voiture. Plus tard Jaja me dit que Papa avait épargné la main droite car c’est la main qui écrit.

5 Comments

  1. Je découvre à travers ton article cette auteure et j’ai très envie d’en savoir plus car tu en parles d’une façon très convaincante!

  2. J’ai eu moi aussi un vrai coup de cœur pour Americanah l’année dernière.
    Bien au-delà de l’histoire d’amour, c’est le regard incisif de l’auteure sur la vision des noirs aux USA (mais qui peut parfaitement s’appliquer en France) , la perception de la narratrice de tous ces comportements et réflexions en apparence si anodines (dont certaines que je pourrais faire ! ) et qui après coup nous apparaissent si naïves (on peut venir d’Afrique et trouver qu’il fait chaud l’été à New-York) ou si bêtes (je reconnais avoir eu un peu honte à quelques reprises). Certains comportements que d’aucun pourrait qualifier de racisme du quotidien mais qui révèlent souvent bien plus la méconnaissance des différences (telle les problématique des peaux noires ou celle des cheveux crépus ) ou le malaise des interlocuteurs ayant tendance à en faire trop pour démontrer qu’ils ne sont pas racistes ( pas la peine en parlant d’une femme noire de se sentir obligé de dire qu’on la trouve belle ! ) .
    A travers son blog, L’héroïne fait partager avec humour et insolence sa perception de tous les clichés dont est jalonné son quotidien de femme noire et d’immigrée. Elle interroge aussi sur ce qu’est être noir aux USA, mais aussi être noir et américain, ou être noir et non américains .
    Le politiquement correct en prend un sacré coup dans l’aile et il faut avouer que cela fait un bien fou

    Après ce livre qui fait pour l’instant l’unanimité après des amis à qui je l’ai offert, j’ai enchaîné sur L’hibiscus pourpre, lu presque d’une traite en début d’année.
    Les autres sont au programme de mes lectures de cet été !

    • sans l’histoire d’amour, je sais que j’aurais beaucoup moins aimé, cela apporte la touche de romanesque qui sépare un roman d’un essai et pour le reste je te rejoins c’est un regard très juste et incisif sur la vision des noirs aux USA

  3. Comique ! Je viens de terminer Americanah et comme toi, je me suis jetée sur l’Hibiscus et l’autre moitié du soleil. Je ne suis à priori pas passionnée de littérature africaine, ça me parle peu, mais j’ai adoré son écriture !

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