On sait tout de suite qu’il s’agit d’elle, la plage du Sillon, avec ses brises lames, à nus ou engloutis par les flots. A sa gauche, on apprend à reconnaître le fort national accessible à marée basse et tous les soirs, en attendant derrière le muret en surplomb de la plage, on assiste au coucher du soleil à sa gauche ou à sa droite selon où l’on s’est posé.
La plage du Sillon, on la reconnait avec ses panneaux de signalisation mettant en garde les promeneurs / les badauds / les prêts-à-tout pour une bonne photo contre la force des vagues, la chaussée qui se déforme, la puissance du vent quand le temps est mauvais. A vrai dire, j’aimerais bien la voir déchaînée …en sécurité assise dans une bow-window. )
Ce sentiment de liberté et de bien être que je ressens ici est sûrement lié à ce double horizon qu’elle offre : droit devant, l’horizon marin ; sur le côté cette bande de sable de 2 km qui s’agrandit et se rétrécit au rythme des marées.
En regardant loin devant, le clignotement des phares apparaît et parmi eux, à côté de l’ile de Cézembre, se trouve le phare du Grand Jardin, tristement célèbre suite au naufrage qui, en 1905, coûta la mort à plus de 125 passagers.
Sur la plage du Sillon, les lumières ne sont jamais les mêmes, d’une heure à l’autre de la journée, d’un jour à l’autre, d’une saison à l’autre. Aucun coucher de soleil ne se ressemble. Chaque soir, sur la plage, dans la mer, se dessinent des tableaux différents.
A marée haute, l’odeur iodée est plus forte, l’étendue bleue est plus impressionnante, des vagues, au gré des courants, viennent parfois s’écraser sur la digue, éclaboussant ceux qui se sont trop approchés du bord. A marée haute, la mer est quasi vierge, son ressac plus intense. Je me sens bercée, hypnotisée par ses balancements et ses sons.
A marée haute, je m’imagine dans une des belles villas bordant la digue jusqu’à la plage de Rochebonne, je me souviens de cette vue magique qui s’offrait à moi lorsque j’ai séjourné aux Thermes de St Malo il y a 9 ans.
L’idée que la mer pourrait en un instant tout engloutir est tapi dans un coin de mon cerveau, elle ne repose sur rien de rationnel mais elle rend le moment excitant et unique.
A marée basse, la plage du Sillon de St Malo s’anime de milles activités : ici on ne lutte pas pour trouver un coin où étaler sa serviette, ici pas d’océan de parasols, de vendeurs de chouchous et de boissons fraîches, pas de queue devant la douche pour se débarrasser du sel marin qui tire la peau.
Ici le matin, à marée basse, les joggeurs et les marcheurs foulent le sable sans se bousculer, les rêveurs vont d’un bout à l’autre emplissant leurs poumons, vidant leur esprit. Les familles et les groupes débarquent plutôt l’après midi. Côté sable, on construit des châteaux avec toujours plus de tours (il faut aller loin pour remplir les petits seaux d’eau), des trous piscines que les goélands viennent parfois « inspecter », on joue au ballon, aux raquettes, au molki, on tend un filet pour jouer au volley, des cerf volants serpentent dans le ciel, des chars à vent glissent sur le sable…
Côté mer, on cherche des coquillages, on fait corps avec les vagues couché sur une planche ou debout sur un surf, on s’initie à la navigation, on oublie les 19° degrés en affirmant qu’elle est super bonne, on rame, on cherche des crabes avec une épuisette, on observe les bernard l’ermites…
C’est un spectacle permanent et gratuit et la mer efface bientôt toutes les traces humaines (au moins les éphémères, cet été à St Malo il y avait pas mal de pancartes « plages sans mégots » comme si on pensait qu’il était normal de jeter ses mégots dans le sable et qu’ils allaient disparaitre tous seuls) avant une autre représentation le lendemain.
Vous comprenez pourquoi elle me manque, la plage du Sillon, à Lyon, non ?
6 Comments
Je comprends tout à fait…. En plus, c’est la plage de mon enfance 😉
tu dois y avoir beaucoup de souvenirs alors !
et oui, je comprends pourquoi….
:))