Contrairement à ce que pourrait laisser penser la couverture, dans son dernier roman, A prendre ou à laisser, Lionel Shriver ne parle ni de vin, ni d’alcoolisme. Peut-être est un clin d’œil à une habitude du couple vedette du roman, Kay et Cyril, qui se sont fixés de ne jamais boire avant une certaine heure.
Ce couple, qui, après quelques verres un soir, alors qu’ils ont la cinquantaine, décident d’un pacte : mettre fin ensemble à leur vie lorsqu’ils auront 80 ans pour ne pas devenir un poids pour la société et pour ne pas connaitre la vieillesse quand la santé physique ou mentale se font la malle.
A partir de ce « pitch » de départ, Lionel Shriver, s’amuse à imaginer de multiples scénarii, certains plus optimistes que d’autres (d’où peut-être le verre à moitié vide et le verre à moitié plein de la couverture).
Filons la métaphore jusqu’au bout : A prendre ou à laisser est un très bon cru ! J’en ai dégusté chaque gorgée avec délectation, en riant jaune car Lionel Shriver use de son humour noir et caustique pour traiter le sujet de la fin de vie et de la vieillesse. Elle excelle dans ce format « nouvelles » comme c’était déjà le cas dans Propriétés privées auscultant avec finesse aussi bien la société britannique que ses contemporains.
Brexit, Covid-19, système de santé, maison de retraite, à travers ce couple, Lionel Shriver aborde bien d’autres sujets avec un sens de l’à-propos qui fait mouche.
Derrière le rire, l’effroi n’est jamais loin : lorsqu’elle ose imaginer les pires hypothèses (serait-elle un peu sadique ?), lorsque la maison de retraite devient prison qu’elle soit dorée ou pas, lorsque les enfants se mettent à traiter leurs parents comme des neuneus.
Ce que j’aime aussi avec Lionel Shriver sait que si son œuvre a toujours été un peu provocante (je pense en particulier à Il faut qu’on parle de Kévin où elle osait mettre en scène une mère qui n’aime pas son fils), on ne bascule jamais dans un cynisme à la Houellebecq ou à la Beigbeder. Si elle est égratigne ses personnages, on ressent aussi la tendresse qu’elle nourrit à son égard.
Parce qu’elle arrive parfaitement à concilier ton mordant, réflexion stimulante et émotion, il faut lire A prendre et à laisser ! (et tous ses autres livres !).
2 Comments
J’ai lu Il faut qu’ on parle de Kevin en son temps, c’est un livre qui m’a beaucoup marqué. Je n’avais pas le souvenir que la mère n’aimait pas son fils mais plutôt que son intuition, son malaise devant lui l’ amenaient à être en retenue. Comme quoi, les souvenirs de lecture…
peut être plus une question d’interprétation que de souvenirs ?)