Vive le mauvais temps d’Avril (bien qu’en vrai je rêve de terrasse et de mettre enfin mon manteau au placard), cela m’a permis de lire un roman qui met à mal le rêve californien, un polar écossais et un roman graphique qui passe au scalpel le métier de médecin.
Un pays formidable : Quand le rêve californien tourne au cauchemar
J’avais beaucoup aimé Un fils en or de Shilpi Somoya Gowda, argument suffisant pour ouvrir son dernier roman, Un pays formidable.
Ashok et Priya sont partis de Bombay très jeunes, ils ont bossé dur pour avoir une « bonne situation » et vivre dans un beau quartier en Californie du Sud. Mais un jour, leur fils de douze ans est arrêté, suspecté de terrorisme et tout bascule dans leur vie.
Un pays formidable est un portrait tout en nuances d’une famille d’immigrés prête à tout pour s’intégrer et surtout à ne pas faire de vagues quoiqu’il arrive. Cette exigence envers eux même, Ashok et Priya l’ont d’autant plus avec leurs trois enfants, « condamnés » à être parfaits. Ce grain de sable qui fait tout dérailler sera l’occasion pour ces parents de découvrir qui sont vraiment leurs enfants, derrière l’image et le destin qu’ils ont quasi tracé pour eux mais aussi quel est ce visage de l’Amérique qu’ils refusaient de voir jusqu’à présent, celui de l’Amérique raciste.
Shilpi Somoya Gowda nous suggère comment, après le 11 septembre, les immigrés sont tous devenus suspects et dérangeants. Elle dit aussi avec une justesse épatante combien trouver une place où l’on se sent bien dans un pays d’accueil est loin d’être facile.
Tempête sur Kinlochleven : Retour écossais vers le futur
Il y a un point commun entre le dernier roman de Jean-Paul Dubois (que j’ai trouvé assez déprimant !) et le dernier thriller de Peter May : Quand ces deux écrivains envisagent le futur, ils imaginent les grandes villes et une partie de la terre inondée suite au dérèglement climatique. J’avoue qu’au début de Tempête sur Kinlochleven, j’ai eu un peu de mal à rentrer dedans, peut-être parce que je n’arrivais pas à me projeter dans le monde en 2050 avec ses « inventions ». Mais au premier flash-back pour en savoir plus sur le personnage principal, l’inspecteur Brodie, j’ai été embarquée. Et c’est devenu carrément addictif quand pour les besoins de l’enquête, Brodie part à Kinlochleven, village des Highlands secoué par les tempêtes.
A ce point du livre, on bascule dans le suspens avec un hôtel aussi désert et étrange que dans Shinning, dans une cadence où les rebondissements donnent envie de lire jusqu’à très tard. La météo déchaînée contribue à créer une atmosphère de fin du monde. Si Tempête sur Kinlocleven se résumait à un thriller où il s’agit de trouver le meurtrier et son mobile, le roman serait un polar classique mais Peter May trace en parallèle de cette intrigue, le portrait d’un homme qui porte le poids de la culpabilité et qui veut, si ce n’est trouver l’absolution, s’expliquer avec sa fille après 10 ans de silence. Et c’est l’histoire de cet homme qui tient aussi en haleine.
Cela m’a rappelé que je n’avais pas encore lu le dernier tome de la trilogie écossaise de Peter May. Un prétexte tout trouvé pour retourner en Ecosse rapidement !
Docteure : Vie ma vie de jeune médecin
Pas à une contradiction près, je suis quasi phobique des médecins (vous savez quand une fois dans la salle d’attente, vous mourrez d’envie de prendre vos jambes à votre cou et de fuir) et des hôpitaux (je me suis déjà évanouie car trop « impressionnée » par les lieux ) mais j’ai tout de même une curiosité pour ce milieu. C’est cette contradiction qui m’a poussé à regarder la série Hippocrate (que je vous conseille !) alors que rarement une série a généré chez moi autant de stress ! Ne me dites pas c’est du cinéma, c’est le genre d’argument qui ne fonctionne absolument pas chez moi et si c’était le cas je ne me retrouverais jamais en larmes en lisant un livre ). Je ne sais pas trop dans quelle catégorie ranger Docteure, Médecine aux rayons X, pas vraiment un roman graphique mais des textes écrits par une jeune docteure (The French Radiologist sur Instagram) et des dessins de Jul (non pas le chanteur, le dessinateur, celui de Silex and the city dont les anachronismes me font toujours marrer) . C’est d’ailleurs l’idée qu’il y ait de l’humour dans un univers qui m’angoisse qui m’a poussé à ouvrir ce livre.
Sophie-Hélène nous propose donc d’enfiler la blouse de médecin mais avant cela de nous glisser dans la peau d’une étudiante en médecine (pas forcément la partie où j’ai appris le plus de choses, Hippocrate le film cette fois étant assez documenté sur ce sujet). La partie consacrée à la vie à l’hôpital (les années d’internat) m’a plus intéressé avec toutes les traditions dite carabines (dans la lignée des chansons paillardes), ce que signifie être une femme à l’hôpital aujourd’hui, comment sont organisées les gardes, combien est payé un interne….
Ce que j’ai apprécié c’est le recul de Sophie-Hélène, peut être que dans quelques années elle aura des réflexes corporatistes mais aujourd’hui elle a gardé son esprit critique. Ce dernier doublé des illustrations drôles de Jul donne un livre qu’on lit comme un roman en se disant qu’il faut tout de même avoir une sacrée vocation pour choisir cette voie et s’engager dans des études aussi longues !