Un temps pour tout

Celle qui ne savait pas se spécialiser

(contenu paru initialement dans ma newsletter, mon nombre d’abonnés étant confidentiel -euphémisme-, je me permets de la repartager ici).

J’ai lu récemment une newsletter dont les mots ont particulièrement résonné chez moi, la newsletter d’ Alice Somhusbands. J’aime les gens qui doutent comme chantait Anne Sylvestre et plus tard dans une version que je préfère Albin de la Simone, Jeanne Cherhal et Vincent Delerm. Dans sa dernière newsletter, Alice doutait beaucoup car je la cite :

Mon problème depuis le début c’est que je n’ai pas de cohérence dans ce que je fais. Ça fait que je me perds à faire plein de techniques et styles différents parce que je peux le faire et que j’ai peur de m’ennuyer si je fais toujours la même chose“.


Je me suis dit que j’avais exactement le même ressenti, que c’était l’occasion de revenir en arrière sur ma pratique artistique mais aussi de mettre cela en perspective avec le reste de ma vie car cette non-spécialisation me suit en fait depuis toujours.

Aquarelle, septembre 2022

Celle qui avait commencé par l’aquarelle

J’aimerais vous raconter que je dessine depuis toujours, que j’ai des malles remplies de cahiers et de croquis endormis dans un grenier mais que j’ai mis cela sous le tapis pendant des années jusqu’au jour où j’ai reçu un signe et ressorti mes crayons… le story telling serait parfait. Sauf qu’en primaire lorsqu’on devait illustrer les poèmes à apprendre par cœur dans le cahier de poésie, je finissais toujours par demander à ma mère de m’aider (euphémisme). Sauf qu’en primaire c’était mes rédactions qui étaient lues tout haut et pas mes dessins qui étaient montrés en exemple.

Je ne suis pas tombée dans le dessin toute petite (sinon peut-être que j’en vivrais aujourd’hui mais avec des si comme dirait l’autre). Pendant le premier confinement, contrainte de rester dans un même endroit (cela a été pour moi le plus dur, ne plus pouvoir marcher tout mon saoul et dans un périmètre très limité) , j’ai éprouvé le besoin de m’échapper autrement et la lecture ne suffisait plus. Je suis tombée par hasard sur des tutos de Tribulations de Marie, j’ai acheté un de ses kits et je me suis mise à l’aquarelle. Mais j’ai assez vite compris que ce média ne me correspondait pas même si j’ai essayé de persévérer pendant un petit moment (sans beaucoup progressé).

quand je vois ce dessin, je me dis que j’ai quand même progressé depuis (heureusement c’était il y a 4 ans !)

Et qui avait continué avec le pastel gras

Et puis il y a eu la rencontre avec le pastel gras via l’artiste Beya Rebaï dont j’ai tout de suite adoré l’univers très coloré. J’ai suivi tous les pas à pas du livre qu’elle a publié (assez rare pour être souligné car globalement dès que quelque chose est trop scolaire, je n’arrive pas à accrocher). 4 ans plus tard, j’aime plus que tout dessiner avec mes crayons pastels, j’en ai usé un certain nombre et je rachète certaines couleurs régulièrement.

Sans fermer la porte à d’autres techniques

feutre et aquarelle, urbain sketching

J’ai eu ma période Urban sketching (ou croquis urbain sur le vif) qui n’est peut-être pas définitivement close d’ailleurs car cela me tente toujours quand je voyage et que j’ai tout le matériel nécessaire.

Et puis suite à un cours de linogravure, j’ai beaucoup apprécié le côté relaxant des moments où on grave notre plaque et j’ai commencé à réaliser des cafetières italiennes en linogravure.

Mais où est la cohérence ?

Version optimiste : je suis une grande curieuse qui a toujours envie d’expérimenter. Version pessimiste : je ne sais pas choisir, je ne sais pas me spécialiser. Le résultat est que lorsque je me recule pour avoir une vue d’ensemble sur mon compte Instagram, qui est une sorte de portfolio en ligne, cela manque pas mal de cohérence. Et cela d’autant plus, que j’aime dessiner des paysages de mer mais aussi des personnes, des scènes urbaines, des objets de la vie quotidienne.

J’ai interrogé plusieurs personnes de mon entourage pour savoir ce qu’ils préféraient mais cela ne m’a pas vraiment aidé : certains aiment mes cafetières roses, d’autres au contraire me citent mes paysages qui permettent de s’évader. Récemment en postant mes bustes colorées, on m’a dit que c’était ce que je faisais de mieux jusqu’à présent.

(les épisodes avec Lola Lafon sont aussi très intéressants)

J’ai alors repensé à une interview de Philippe Jaenada dans Bookmakers (un podcast que je vous conseille si vous aimez être dans les coulisses de la création littéraire et en particulier les épisodes de Philippe Jaenada si vous aimez ses livres et son art de la digression). Il racontait qu’il avait reçu des avis diamétralement opposés sur ses premiers livres : certaines personnes adoraient ses digressions (ce qui est mon cas) et d’autres lui disaient, au contraire, que ces livres seraient beaucoup mieux sans. Jaenada concluait qu’il fallait avoir suffisamment confiance dans son travail pour se détacher des divers avis (en sachant qu(on n’est pas à l’abri d’une non-rencontre : une illustration qu’on aime beaucoup peut rencontrer un grand flop, c’est ce qu’expliquait l’illustratrice Louisa aka Ectomorphe dans une ses vidéos ).

Celle qui ne voulait pas choisir ses études supérieures

Alors devant mon incohérence visuelle et artistique, faut-il que je ne mette que des illustrations aux pastels sur mon compte Instagram ? Je n’ai pas la réponse (mais si vous avez un avis sur la question, n’hésitez pas à commenter) mais ce que j’ai compris c’est que cet “éparpillement” a des sources dans mon passé. J’ai en effet toujours voulu garder le plus de portes ouvertes à commencer au moment des études.
Comme j’avais de très bonnes notes en français et que j’étais une grande lectrice, on m’a conseillé en terminale de faire khâgne et hypokhâgne. Je savais que l’esprit de compétition qui règne dans ces formations ne cadrait pas avec ma personnalité mais surtout je n’avais pas du tout envie de ne faire QUE du français et de la philo.

Je suis rentrée à Sciences Po Grenoble car j’étudiais l’histoire, les relations internationales, l’économie, les sciences sociales, le droit et même si toutes les disciplines ne me plaisaient pas, j’aimais cette pluralité.

10 adresses pour les amoureux du livre à La Rochelle

Celle qui ne voulait pas un boulot trop spécialisé

Je suis à un âge (avancé ) des bilans et si je suis tout à fait honnête avec moi-même, sans tomber dans le mélodrame, je n’ai pas l’impression d’avoir réussi ma vie professionnelle. Quand j’étais au lycée, je voulais trouver un métier qui me permette de bouger tout le temps, de voyager. Quand j’étais à sciences po, je voulais être journaliste. J’ai passé une grande partie de ma “carrière” derrière un bureau, les fesses vissées à une chaise et l’écriture n’est pas au cœur de mon poste actuel.

J’ai beaucoup réfléchi dernièrement à cette insatisfaction chronique qui m’a suivi depuis mon premier boulot. Je me suis rendue compte que dès qu’un poste est trop spécialisé, que le périmètre est relativement limité, le sentiment d’ennui arrive très vite. Au contraire, le seul poste où mes tâches étaient beaucoup plus diversifiées (lorsque j’ai bossé en lecture publique), je n’ai jamais ressenti de lassitude (et là, vous me dites : tu l’as ta solution !….sauf qu’aujourd’hui la seule chose dont j’ai vraiment envie c’est de consacrer le plus de temps possible au dessin ou d’ouvrir un café-libraire mais ça c’était avant de lire un énième article sur les nombreuses faillites des librairies en raison de leur faible rentabilité ).

fondant marron chocolat poire

Celle qui n’avait pas pas un blog de niche

Il y a un conseil qui revient tout le temps en marketing : avoir un sujet de niche pour se démarquer, pour avoir une audience /un public bien défini.
C’est peut-être pour cela que tous les “coach” de créatrices conseillent de se spécialiser dans un sujet différenciant.

Du temps où les blogs avaient le vent en poupe, la même idée était répandue. Avec le nom de mon blog “Chroniques d’une chocoladdict‘“, il était logique et probablement plus “vendeur” de ne proposer que des articles, recettes autour du chocolat. Peut-être que plus que le sujet c’est le fait d’écrire et de partager qui m’a toujours plu car depuis 19 ans, j’écris sur mes voyages, mes lectures, mes bonnes adresses, mes recettes testées et approuvées, mes nouvelles expériences autour du dessin. Si je n’avais parlé que de chocolat, je ne sais pas si mon blog serait toujours en ligne et actualisé régulièrement.

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